Le puffin de Scopoli, un oiseau de grand large, vulnérable sur terre

Planeur infatigable, le puffin de Scopoli, également appelé puffin cendré de Méditerranée, est un oiseau qui passe la majorité de sa vie en mer au large des côtes. A l'aise dans les airs et sur les flots, le puffin est plus maladroit à terre... un passage néanmoins obligé pour assurer la reproduction de l'espèce. De mars à octobre, chaque couple ne pond qu’un seul oeuf qu'il couve dans les anfractuosités des falaises calcaires et dans des terriers sur les archipels marseillais.

L'unique poussin du couple devra survivre aux nombreux périls qui le guettent et qui sont, pour la plupart, générés par l'Homme. Ces oiseaux, comme d'autres espèces insulaires, sont considérés comme "naïfs" : les prédateurs naturels étant absents de leur environnement d'origine, ils n'ont pas, au cours de leur évolution, développé de stratégie de défense ou simplement de méfiance. De ce fait, ces oiseaux sont fortement impactés par des espèces introduites sur les îles comme le rat noir et le chat haret (chat domestique retourné à l'état sauvage). L'urbanisation, la pollution lumineuse, la divagation de chiens et la fréquentation hors sentiers sont également d'importantes menaces pour ces animaux très sensibles aux dérangements.

S'il survit à tous ces dangers, le poussin prent son envol début octobre pour un voyage de 5 ans entre la mer Méditerranée et l’Atlantique. Au terme de ce périple, l’oiseau reviendra sur le lieu de sa naissance pour se reproduire à son tour. 

Un suivi réalisé à chaque étape du cycle de reproduction des oiseaux

Le suivi de la reproduction des puffins de Scopoli assuré par les agents du Parc national consiste à visiter trois fois par an les 500 terriers connus sur le territoire pour contrôler les individus. Le premier passage s’effectue pendant la période de couvaison, le second après l’éclosion des poussins, le troisième quelques jours avant l’envol des jeunes.

Dans le cadre d’un programme scientifique national piloté par le Centre de Recherches sur la Biologie des Populations d’Oiseaux (Muséum national d’Histoire naturelle), des opérations de baguages des adultes et des jeunes puffins de Scopoli sont également menées. Suivant un protocole bien défini, les agents du Parc national dotent les oiseaux d’une bague comportant un numéro unique, ils mesurent leurs bacs, leurs ailes et prennent leurs poids. Toute l'opération est indolore pour les oiseaux qui sont manipulés avec soin.

Connaître pour protéger

Le suivi de la reproduction et le baguage des puffins de Scopoli est assuré depuis 1976 sur les archipels du Parc national des Calanques. Les données récoltées permettent de mieux connaître l’histoire de chaque individu (taux de survie, fidélité au terrier et au partenaire, longévité etc.), d’identifier des dynamiques de populations et d’adopter des mesures de gestion adaptées pour favoriser la reproduction et le maintien de l’espèce.

L’ancienneté des données récoltées permet d’observer une dynamique de population favorable à l’espèce. C'est un indice encourageant de l’efficacité des mesures de gestion mises en œuvre par les équipes du Parc national, comme la pose de terriers artificiels, l’entretien des sentiers (pour éviter une fréquentation trop diffuse des sites sensibles) et les actions ciblées permettant de maîtriser les populations de rats noirs et de chats errants. Rappelons qu'au début des années 2000, le niveau de reproduction était jugé insuffisant pour assurer la viabilité de l'espèce... En octobre 2022, près de 400 poussins juvéniles ont pris leur envol vers le large. Nous leur souhaitons bon voyage !